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lundi 3 août 2009

The Books of magic : do you believe in magic ?

Une anecdote "magique" :
Ayant été introduit à John Bolton via les revues Special USA et Epic dans les années 80 c'est par le biais de ce dessinateur que la bibliographie de Neil Gaiman m'est apparue. Les deux auteurs travaillant en effet souvent ensemble.
Les premiers épisodes du Sandman de Gaiman (1988-89-) publiés par les éditions Le Téméraire en 1997 (1 ) ayant été les premiers comics cartonnés disponibles de cet auteur en français à l'époque, il a été frustrant de passer les années suivantes sans que ce "Books of magic", daté 1990 et reconnu dans les pays ango-saxons comme une référence ne suive la même logique de traduction.
En 1998, je me décidais donc à acheter via Amazonmarketplace ce classique, d'autant plus qu'il réunissait 4 des plus grands dessinateurs d'heroic fantasy de bande dessinée.
Il me fallu néamoins pratiquement 1 an pour récupérer le livre, celui-ci ayant transité par l'adresse américaine d'une amie alors professeur de français en Louisiane (et oui, à l'époque, le port pour les livres était faramineux) (!!) puis enfin presque dix ans pour me décider à le lire (!!?) (En anglais, pas évident en effet, et la flemme, parfois...)
(ci à gauche, 1ere édition du TPB)

Voilà donc enfin un essai personnel sur ce roman graphique pas comme les autres et en français.
Cela ne sera pas de trop, et les plus curieux ne me démentiront pas, considérant que la chronique détaillée de cette oeuvre n'apparait pas de manière envahissante sur la toile, loin s'en faut.

Une oeuvre difficile.
... On peut être fervent amateur de récits fantastiques, d'héroic fantasy, de science-fiction ou de mangas de genre, et trouver ce "Books of magic" néanmoins assez hermétique.
Sensation décuplée lorsque on a comme içi à le lire dans le texte (ie : en anglais) puisque qu'il n'a toujours pas été traduit. (2)
On pourra regretter un tel état de fait en 2009, époque où Neil Gaiman est aujourd'hui reconnu en France comme un grand auteur de fantasy et où la plupart de ses oeuvres on eu droit à un traitement conséquent. (cf. la série de comics de genre qui l'a révélé dés 1988 : Sandman, publié en intégralité via Delcourt et Panini en France depuis 2004, mais aussi d'autres récits illustrés (3).
Mais "The Books of magic" n'est cependant pas tout à fait un comics comme les autres, ceci expliquant peut-être cela...

Son synopsis : (attention : révélations !)
En Angleterre, un adolescent skateur boutonneux : Timothy Hunter est abordé par 4 individus louches, en pardessus : Doctor Occult, Mister "E", Constantine et ?
Ces mystérieux personnages ont apparemment une mission : faire se révéler ce jeune garçon en lui faisant découvrir les mondes occultes de la magie. Passé, présent et futur.
Pour cela, chacun l'accompagnera à son tour à travers temps, espaces et rêves. Chacun de ces "voyages" initiatiques étant dessiné par un auteur différent. On y reviendra.
© Bolton/Gaiman/Dc/Vertigo

1er voyage : "Le labyrinthe invisible", dessiné par John Bolton.
Le passé, où Timothy accompagné par l'homme sans nom (qui entre temps a changé le yoyo du garçon en hibou de compagnie) "voit" les origines de la magie au fil des siècles et des civilisations.
Pas le chapitre le plus intéresant à mon goût. Même s'il était nécessaire pour resituer le sujet. On y trouve beaucoup d'illustrations de dessins antiques, de gravures ou de parchemins, et la présentation de sites historiques associés à la magie.
© Bolton/Gaiman/Dc/Vertigo
2e voyage : "Le monde de l'ombre", dessiné par Scott Hampton.
John Constantine, dont on nous dévoile les facultés de "transportation" emmène Timothy à St Fransisco découvir quelques figures locales de la magie. Où l'on fait connaissance avec Boston Brand, sorte de fantôme qui guidera Timothy lors de ses échappées, avec des dialogues quelque peu hermétiques, apparaissant de plus à chaque fois sous une forme différente.
Où l'on est aussi témoin de deux tentatives d'assassinat sur le garçon. Tentatives heureusement mises en déroute par des amis magiques bienvenus.
© Hampton/Gaiman/Dc/Vertigo
C'est aussi dans ce chapitre que Constantine nous présente Zatanna, magicienne et amie qui va leur offrire l'hospitalité mais aussi mettre malencontreusement notre jeune ami en danger, en l'invitant durant une courte absence ce son mentor dans une fête d'Halloween très mal famée.
Le retour de Constantine nous révèle néanmoins son étonnant pouvoir de persuasion, et la crainte qu'il inspire les sauve tous trois. On n'ira pas plus loin cependant dans les explications de ce "pouvoir". (4)
Boston Brand se déguise en enfant et Zatana le gâte.(© Hampton/Gaiman/Dc/Vertigo)
3e voyage : "Le territoire du crépuscule d'été" (dessin : Charles Vess)
C'est au tour du docteur Occult d'emmener Thimothy sur les chemins du merveilleux, à travers des paysages fabuleux.
Où l'on découvre que les apparences sont souvent trompeuses et que le docteur n'est pas vraiment ce qu'il laisse apparaitre habituellement.
Où l'on parcourt faérie et l'univers particulier de de son marché, que l'on retrouvera plus tard d'ailleurs dans "Stardust". (voir ce titre)
Une scène du marché (© Vess/Gaiman/Dc/Vertigo)

Timothy y gagne un "mundane egg", oeuf créateur d'univers qui lui sera d'une grande utilité plus tard, lorsqu'après avoir franchi le lac de sang et avoir échappé à la monstrueuse sorcière Baba yaga (pour s'être écarté du chemin), il devra échapper à la reine de faérie Titania.
Entre temps, il aura rencontré Sandman, le gardien des rêves.
Timothy, dans cet univers a néanmoins gagné la clé d'un royaume... Lui servira t'elle dans d'autres aventures ?... c'est à prédire.

4e voyage : "La route vers nulle part". (Dessin : Paul Johnson)
Cette dernière escapade à travers le temps, vers le futur et les limites de l'univers va se faire en compagnie de Mister "E", personnage inquiétant aux lunettes opaques (il est aveugle). Celui-ci n'a pas l'air d'être vraiment apprécié par ses pairs, peu rassurés d'ailleurs, et Constatine remarque qu'il dissimule sur lui un pieu affuté (pour sa lutte contre les vampires..?)
Partant néanmoins, leur voyage les amène 15 ans dans l'avenir, où les forces magiques du bien et du mal se combattent violemment. Constantine et Timothy, plus agés y sont d'ailleurs opposés.
Mais comme dit "E" : "Ce n'est pas le seul futur. Il y en a d'autres où tu es un mage suprème, champion de la lumière, et il y a un nombre infini d'autres options".

Alors qu'ils progressent vers une époque encore plus éloignée, Mister "E" révèle au garçon la raison de sa cécité et la violence de son père, extrémiste catholique qui, l'ayant surpris enfant avec une image frivole l'a rué de coups puis lui a crevé les yeux... (faisant de lui cette créature pleine de rancune et de haine.)
(...) "Là, la technologie a évolué à un point où les hommes ne l'appréhendent plus. Les horizons se sont élargis. Tous les jours l'humanité est confrontée à des aliens de formes inimaginables, même dans les plus étranges bestiares et grimoires médiévaux."
"Là, les héros sont apparus. Héros de science, de magie". (avec une allusion à Superman et l'univers Dc comics, ainsi qu'à celui de Marvel via le personnage de Darkfeist.)

A ce monent, Mister "E" (ou Gaiman) se lance dans une explication de la signification de l'Archmage,qui se trouve au centre du monde de sorcellerie, telle une balance. Mister "E" compare cet Archmage à la femme et son principe de fabrication du monde... mais il s'interrompt lorsqu'il se rend compte de son emballement malsain vers le "second sexe" qui le répugne.
Là, on comprend qu'il n'est vraiment pas équilibré et que les inquiétudes des autres guides étaient justifiées. Mais il était le seul à pouvoir mener Timothy en ces mondes.

Soixantième siècle : des créatures mi-ordinateur, mi esprits laissent nos deux voyageurs sans voix...
...Des millions d'années plus loin, d'étranges humanoïdes verdatres vivant dans l'eau communiquent avec eux..

Pendant ce temps, l'inquiétude gagne les autres "guides" de Timothy. Pourront-ils en effet revenir d'aussi loin ? L'idée d'envoyer Yo yo, le hibou de Tim germe par hasard.

...Encore plus loin... Nos deux voyageurs sont arrivés "au bout du temps", là où le fond de l'univers est indigo. Juste une lumière créee par une sorte de château de verre brille au loin.
Un Hierophant, représentant de tous les papes, chamanes et magiciens les accueille et les présente à ses roi et reine, qui disent n'être que des illusions, des oscillations dans "l'horizon de l'événement final".
Le Hierophant et le château de verre (© Johnson/Gaiman/Dc/Vertigo)

Timothy étant interrogé sur son devenir (dans le passé), il parle de magie, et on lui présente Jack o dreams, sorte de bouffon, ressemblant étrangement à Constantine.
Le seul message sensé que ce personnage délivrera : "Un peu de magie est une chose plutôt dangereuse".

Les quittant vers le noir et le néant, c'est ce moment que choisit "E" pour laisser transparaitre sa vraie nature diabolique et sortir son pieu. (...)

Yo yo arrive cependant à temps et s'interpose, en se sacrifiant. Puis un couple étrange intervient et leur intime l'ordre de repartir : Un homme encapuchonné, portant un énorme livre (la destinée), et une belle jeune femme (symbole de la vie ?)
Celle-ci renvoie "Mister E" vers sont temps, mais en l'obligeant à retourner "marche par marche" à travers une centaine de billion d'années; offrant par contre à Timothy de revenir par un moyen plus immédiat.

La question est alors posée par ses trois guides retrouvés : choisira t'il la voie de la science ou celle de la magie ?

... D'abord désolé de devoir refuser, car effrayé, Thimothy après être rentré chez lui et avoir retrouvé sa morne vie et son père alcoolique changera finalement d'avis.

...Ouverture vers un nouveau cycle, on l'imagine. N'oublions pas en effet qu'il a gardé une clef.

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Deuxième (tentative) d'explication : Plusieurs dessinateurs pour une même histoire n'est pas chose courante, (en 1993) et même si les amateurs de comics US ont appris à s'habituer à ce genre de fantaisie ces dernières années via les divers crossovers de DC comics ou de Marvel, on pourra s'interroger sur la réaction du lecteur français lambda de l'époque.

Troisième explication : La barrière de la langue, tout simplement. En effet, lire de l'anglais dans le texte n'est déjà pas chose évidente pour la plupart des français, mais lire une bande dessinée, qui plus est un comics, et qui plus est encore mélangeant sorcellerie et sauts dans le temps et l'espace... avec un vocabulaire empruntant tout autant à la poésie la plus littéraire que l'argot de rue et les références à d'autres comics... C'est en trop. La coupe est pleine, il faut être alors sacrément motivé.


En conclusion, ce qu'il ressort de la lecture de ce "Books of magic", en dehors du fait d'être sûr de tenir là effectivement le gama et l'omega de la bande dessinée "moderne" de fantasy pour adulte (et je vais m'expliquer sur ce cet aspect), c'est le plaisir d'être arrivé au bout d'un livre exigeant, tant au niveau de la forme que de son fond, tout comme le permettront plus tard des oeuvres telles From hell, Jimmy Corrigan, ou Watchmen, pour n'en citer que trois.

Alors, une trop forte influence ?

En ce qui concerne l'allusion notée ci-dessus, il suffit de le replacer dans le contexte de l'époque de sa parution (1990) et de comparer une partie de la trame et l'aspect physique du héros (et son hibou) pour faire immédiatement le parallèle avec un autre personnage identique mais au succès nettement plus grand : Harry Potter bien sûr !
Force est de constater qu'autant Joanna K Rowling a réussi, depuis 1997, un beau coup avec les tomes de sa série de romans adaptés au cinéma, autant Neil Gaiman est resté un peu plus dans l'ombre, quoi qu'ayant laissé une empreinte indélébile dans l'univers de la bande dessinée (et du cinéma) via les nombreuses "répliques sismiques" provoquées par ses "Livres de magie".(5)

On a déjà cité Constantine et la série Hellblazer qui a connu un assez beau succès d'édition dans l'univers BD, mais il est indéniable que l'influence que Gaiman a pu laisser auprès de la profession et de la plupart de ses confrères scénaristes ou dessinateurs n'est pas négligeable.

Un chef-d'oeuvre
Ceci étant noté, et même si on pourra reprocher à Gaiman un discours (une vision ?) un peu trop judeo-chrétienne de cette magie, et certains passages un peu verbeux dans ce sens (que cherche t-il à nous dire vraiment avec ces nombreuses allusions à la religion ?), on pourra néanmoins considérer l'oeuvre au final comme un pavé dans la mare, qui a placé la barre très haute.

Aussi, à l'heure ou Sandman, une autre oeuvre antérieure tout aussi exigeante vient de voir son intégrale menée à bien grâce à Delcourt et Panini comics, et où des romans graphiques jugés "difficiles" trouvent à nouveau (cf. Watchmen, d'Alan Moore) ou enfin (cf. Cerebus d'Arthur Sims) les bons chemins des librairies françaises, on peut s'interroger quant à l'absence encore criante de ce dernier (?) chef-d'oeuvre en VF.
Mais...on peut toujours rêver ! (Moi je crois à la magie.)

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Toutes les images sont © Dc/Vertigo/Gaiman

Notes :
(1) Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Sandman_(Gaiman)#Publications
(2) Publié à l'origine sous forme de 4 comics de 1990 à 1991 chez le label adulte de DC : Vertigo, puis édité une première fois sous forme de trade paperback (recueil) en 1993. D'autres volumes sequels suivront. Voir : http://en.wikipedia.org/wiki/The_Books_of_Magic#Four_issue_series
(3) http://fr.wikipedia.org/wiki/Neil_Gaiman#Comics
(4) John Constattine est un des personnages de cet "univers" qui va bénéficier dans les années 90 de nombreuses autres apparitions et même obtenir son propre titre avec la série "Hellbalzer".
(5) A ce sujet (polémique) on pourra se reporter entre autre au forum http://www.circleofcrones.co.uk où il est question de l'influence (réelle ?) de Gaiman sur J K Rowling.

2 commentaires:

  1. Bravo pour ce travail. J'ai pour l'instant des réticences à me lancer dans Sandman mais j'apprécie des résumés de ce genre.

    Je crois que je vais attendre une hypothétique version française (pas si hypothétique dans le fonds, cela finira bien par se faire)

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  2. Merci à toi pour la réaction.
    ...Sandman, je n'ai toujours pas été au bout. Il faut dire que les dessins ne sont pas vraiment engageant. Mais ce comics fait partie des "bons livres" que je laisse mûrir dans ma bibliothèque jusqu'au jour où je rentre dedans et n'en sors plus avant la fin.
    Ca me fait penser à un film comme "Magnolia" que beaucoup de copains n'ont pas pu voir jusqu'au bout, alors que je le considère comme un chef-d'oeuvre.
    Mais un chef d'oeuvre... ça se mérite, non ?

    Pour "Books of magic", j'imagine que Panini devrait bien s'y coller sous peu. Pourvu qu'ils voient ma note ! (là je plaisante, of course.)

    A++

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