jeudi 25 décembre 2025

Cela va de soi : le regard aiguisé de Serge Annequin

Il n'est jamais trop tard pour dire du bien d'un livre que l'on a aimé. Lecture (tardive) du roman graphique Cela va de soi de Serge Annequin, publié en 2023 aux éditions Paquet.

Découvert en 2017,  avec la série étonnante et tous publics Auguste-Louis Chandel, cet auteur lyonnais n'a cessé de surprendre. Suite au tryptique Des Fragments de l'oubli (2011-2013), où il officiait seul, avec déjà une patte immédiatement reconnaissable, un univers onirique voire fantastique très personnel, hérité des grands classiques, son troisième titre en solo : Horla 2.0, adaptation libre de Maupassant paru en 2018, a largement confirmé ce sentiment. Ce titre a été suivi par Constellations, deux ans plus tard, toujours fidèle aux editions Paquet, avant d'arriver à cette mise en abime autour d'un film fantômatique de Jean Cocteau : Coriolan, court-métrage réalisé en 1950 pour ne jamais être vu (!) et d'un fait divers morbide survenu en 2013 aux Etats-unis où la camera d'un ascenseur d'hôtel est témoin de la disparition énigmatique d'une jeune femme.

Cela va de soi possède tous les atouts d'un très bon livre, vous happant dés les premières pages, grâce à une intrigue exeptionnelle, dans laquelle l'auteur s'engage à 200%, à l'image de son personnage central : Jules, étudiant travaillant sur son mémoire. On croit en cette histoire comme son professeur croit en lui, et tout est fait pour nous convaincre, de la mise en page fluide et de très bon goût, en passant par ce dessin si charmant, dans la lignée d'un Charles Berberian, toujours juste mais léger - parfait pour évoquer les fantômes - au scénario et aux dialogues, riches et équilibrés. Même les couleurs étant traitées avec subtilité. On ressort troublé de cette énigme, de ce film qui ne dit pas son nom et de cette seconde mise en abime, cachée à l'intérieur de  la première. Dire que l'on se noie dans tant de prouesse serait à la fois trop injuste et réducteur, alors, mettons que Serge Annequin possède la force de l'aigle, qui perce les nuages pour voir et montrer ce que l'oeil commun ne voit pas ou ne sait pas voir. Cela va peut-être de soi pour lui, mais le challenge scénaristique était redoutablement casse gueule. Chapeau l'artiste.  


Cela va de soi, par Serge Annequin, 
Editions Paquet, 2023


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