lundi 4 octobre 2021

Métal hurlant nouvelle formule 1 : un retour vers le futur plutôt enthousiasmant, même si...

La célèbre revue Métal Hurlant revient, après ses heures de gloire entre 1975 et 1987, puis un premier Come Back sous petit format de 2002 à 2006. Un retour vers le futur plutôt enthousiasmant, même si...

Présenté sous forme d'un épais Mook de 290 pages, tout en couleur, cette nouvelle version est divisée en une partie rédactionnelle d'environ 50 pages puis le reste en récits illustrés complets. Cette première partie est elle-même  organisée entre entretiens :  avec Enki Bilal, Nicola Minvielle et Olivier Wathelet, Alain Damasio, Éric de Broché des Combes, Emanuele Coccia, William Gibson et enfin Patrice Van Eersel,  et autres articles sur les thématiques actuelles liées à la Science fiction. Le tout coordonné par Vincent Bernière et Nicolas Tellop.

Où l'on fera le point sur la circularité de l'espace et du temps, où l'on lira que "certes, le progrès existe bien mais les rechutes dans l'ignorance sont comprises dans le prix, car  "le temps s'écoule moins par cycle que par hoquets." Et que "la stratégie d'évitement face à l'oracle mauvais est typique de l'homme, qui doute dès qu'il redoute" (D. De la tour). Plus loin, Emanuele Coccia nous parle du rôle fondamental des végétaux et des insectes, et le fait que le monde est un jardin avant d'être un zoo. D'ailleurs, évoquant les végétaux les insectes et même l'homme, elle affirme : "Toute vie est métamorphose". Pour elle, aussi, "on n'habite jamais la ville, on n'habite qu'un chez soit. Les seuls à habiter la ville, ce sont les sans abris".  Pour William Gibson, "le secret de l'avenir consiste dans la multiplicité des passés" et Patrice Van Eersel évoque la Noosphère, la conscience collective des humains. Passionnant. 

Les récits quant à eux développent la thématique de l'anticipation proche. Mathieu Bablet ouvre le bal avec une sorte de suite à son dernier roman graphique Carbone et Sillicium, en reprenant le même genre de décors, pour évoquer l'incohérence des humains, s'auto détruisant. Pet Play de Diego Agrimbau et Lucas Varela évoque le rôle que les animaux pourraient prendre un jour dans notre société, tandis que le très Millerien (ou Munoz) Ciro Hernandez, dit Berliac, avec son noir et blanc profond,  dénonce les travers humains, et ses incohérences, tout en replaçant l'animal au cœur du récit. On est heureux de retrouver Merwan, (Mécaniques célestes chez Dargaud) sur scénario de Sandrine Bonini, dont le trait et les couleurs douces font passer un message clair sur notre incompétence à voir les choses telles qu'elles sont et où elles sont. L'animal est d’ailleurs encore présent. Jérémy Perrodeau, qui nous avait ravi avec ses romans graphiques SF très étranges et colorés chez 2024 nous embarque dans une plongée en eaux très profondes, à la découverte d'un monde inconnu.

Les Québécoises Samia Marshy et Lee Lai racontent avec talent dans un noir et blanc  très doux les jardins bio collectifs et leurs enjeux, dans Ces mains qui nous nourrissent . Le reste est à l'avenant, avec que du bon, et des récits sur les thèmes de l'énergie solaire, le recyclage des matières mortes, le déisme et l'holographie, la médecine clandestine et les avatars, (beau noir et blanc onctueux de Franck Biancarelli), la vaccination forcée, dans un récit osé et plus que d'actualité de Sylvain Runberg et Ingo Römling ; la domotique et ses dangers, (Matt Fraction et Afif Khaled), la vie après la mort ou plutôt la technologie de réplique numérique humaine, par Mark Waid et Julien Perron. Un peu le thème aussi des bons récits de Brian Michael Bendis, Xavier Maméjean et Sergio Salma, tandis que l'IA est abordée par Jerry Frissen. Belle époque quant à lui dévoile le travail magnifique de Roxanne Lumeret, dont on savoure l'influence d'un grand créateur tel Forest, dans sa faculté à nous présenter un sujet compliqué : la télépathie, en usant d'un registre humour décalé bienvenu.  Dans un esprit un peu similaire et tout aussi drôle, quoi que plus fanzine et underground dans le genre, Pierre Van Hiver critique notre société hypra connectée. Ugo Bienvenu se "contente" d'un clin d'oeil rigolo à son dernier album, en imaginant un robot érogène, alors que Adam Sillard propose 4 pages dans un esprit très Claveloux, plus illustratif que narratif. Fabien Vehlmann accompagné d'Alfred jouent aussi l'humour, en concluant dans une ode à l’amour vrai, nu, sans écrans interposés. 


D'une lecture particulièrement intéressante et agréable, la première partie permet de faire le point sur les questionnements les plus récents de nos sociétés, vis à vis du présent et de  l'avenir, à un tournant de l'occupation humaine sur Terre. Les sujets sont abordables, pas trop longs, et ouvrent de très belles perspectives, qui sont ensuite évoquées dans les récits qui suivent. Là, avec une grande qualité de scénarios et de rendus graphiques, tous plus originaux les uns que les autres, bien qu'une homogénéité toute typique de notre époque ressorte clairement, on se surprend à découvrir des noms d'auteurs totalement inconnus, étrangers ou français, parmi d'autres déjà repérés pour leurs travaux ayant fait date depuis une dizaine d'années environ. Car on ne trouvera pas de noms de "classiques" des vieilles écoles. Non. Ce Métal hurlant nouveau départ a l'ambition affichée de dévoiler les nouveaux talents d'aujourd'hui, qu'ils soient déjà reconnus dans de grands magazines internationaux ou édités chez de grandes maisons, ou...à l'instar d'Adam Sillard, dont c'est la première publication, ou Pierre Van hiver et son style bien fanzine underground, un peu moins. C'est au final à un banquet plutôt enrichissant auquel nous invitent les Humanoïdes associés et Vagator production, même si ce format Mook un peu propre sur lui dit beaucoup de la récupération (l'assimilation) d'un genre peu goûté jusqu'aux années 90 et qui a su s'immiscer partout depuis.  Ne faisons néanmoins pas la fine bouche, et attendons la suite : un numéro vintage pour retrouver des saveurs perdues, puis un autre de récits courts, puisque c'est le rythme annoncé : 4 numéros par an, en alternance de ce principe. ...Chiche ?
On veut bien voir et goûter en tous cas, ne serait-ce que pour se régaler de cette richesse créative apparente ! Une anthologie qui fait du bien, mais qui gagnerait (pour ses premiers lecteurs) à un peu plus casser les codes. Sinon, le métal n'hurle pas vraiment.

FG


Métal hurlant nouvelle formule 1, collectif Octobre 2021
Éditions Humanoïdes /Vagator production
288 pages (19,95€) - EAN : 9782731640373

 

samedi 2 octobre 2021

Teuk Shadow 3 par Petelus : couper dans les bulles, il faut !

Le vieux Ninja philosophe créé par Olivier Paire, alias Petelus, revient et doit prendre partie face à la dictature d'un despote criminel. Ça va barder.

Alors qu'il est sorti de la jungle à l'orée de laquelle on l'avait laissé dans le précédent épisode,(qu'il faudra bien que je chronique un jour), Teuk Shadow, ninja de son état, traîne ses sandales à l'extérieur de la ville, au food truck Onatof ("Oh No, Again a Truck of Food"*) tenu par la gentille Lucielle. Là, il y rencontre son pote indic, bossant pour le gouvernement, récemment gangrené par Donatio, un guide suprême ayant pris le pouvoir à l'aide d'une bande armée de demeurés sanguinaires, dans cette "République" bananière où il pleut souvent. Le problème est le suivant : laisser faire, ou mettre un terme à ces exactions. D'autant plus que le contexte sécuritaire est tendu en banlieue : des bandes de scalpeurs sévissent en effet dans les rues. Mais le mal est parfois encore plus vicieux que l'on croit...

 
Si c'est un réel plaisir de retrouver le rare personnage de Teuk, si charismatique, puisque issu d'une publication amateure, comics alternatif format A5, au dessin crayonné poussé très agréable, non encré, on retrouve aussi la verve de Petelus, qui se sert de son Ninja favoris (il est l'auteur d'autres séries), pour exprimer ses sentiments sur le monde qui l'entoure. Et il le fait avec une verve qui lui est propre, c'est à dire... débordante, envahissante. Petelus aime en effet le verbe, mais l'use trop souvent à l'occasion de dialogues à la limite de la logorrhée. C'est malheureusement le seul et unique défaut d'une série qui ne conte sinon que des points positifs. Dans ce troisième épisode, il faut s'accrocher pour aller au bout de certaines bulles, certaines cases, et c'est dommage. Certes, l'humour au 5eme degré sert de coussin à ces déversements de philosophie de comptoir, mais trop c'est trop. Cela nuit au bon déroulement du rythme du récit, d'autant plus que le format A5 n'arrange rien à la lecture de petits textes volumineux, et risque bêtement de faire fuir le lecteur lambda découvrant Teuk Shadow, alors que cette création vaut vraiment le coup. Aussi, un conseil : un tout petit peu moins de texte dans les bulles, et ce sera parfait. D'autant plus que Petelus se fend d'un epilogue explicatif de 3 pages, sur le contexte du "Magal, ou le sacrifice qu'il fallut pour rendre de nouveau le Ninja crédible". 
...Doucement mais surement, et depuis 2014, cette série alternative construit son propre mythe, et pourrait bien déboucher sur une consécration méritée en 2022. C'est tout ce qu'on lui souhaite. FG (*) Petelus rend hommage avec malice ici au fanzine qui l'a vu débuter il y a vingt ans à Roanne : Onabok (Oh No Again a Book of Komics") 
 
Teuk Shadow 3 par Petelus
Éditions Chabert United 2020 
https://www.celledevison.com
 
Dessin tiré du site de l'auteur.

vendredi 1 octobre 2021

Les Contes du givre 2 : un puissant halo d'humanité fluorescente

Suite des magnifiques Contes du givre, créés par Josselin Billard fin 2019 chez Komics Initiative, qui ont su révéler une œuvre très personnelle absolument touchante.

Dans l'introduction de ce second volume, les aquarelles sublimes de Josselin content la création de Ygg, père de tout, fait des éléments fondamentaux de mère nature, sur Hinim. Puis six autres contes vont s'enchaîner, dans un style graphique différent chacun. L'Ode Materia explique la création par Ygg des six oeufs représentant les six espèces du monde d'Hinim. La Mue des saisons utilise une technique art nouveau épurée présentant les personnages tels des mosaïques, tandis que l'Enfant qui parlait avec la mort choisi un dessin plus enfantin, au trait, pour évoquer la mort : Edda, dont la "caresse est à la fois malédiction et récompense". Dans Les huit vies des amants magnétiques, les deux déesses Jumelles et concubines Mnema et Sjarh vont essayer de vivre parmi et comme les six différentes espèce d'Hinim, tout en étant séparées. Bien qu'elles changeront plusieurs fois de corps et de vie, elles  se retrouveront et s'aimeront à chaque fois de manière plus radicale, jusqu'au drame ultime...

La prouesse graphique d'un auteur changeant son style pour chacun des six récits de son recueil de contes, que l'on pourra ne pas considérer comme une bande dessiné traditionnelle, quoi que la narration est bien présente en une suite de cases et graphismes ordonnés, réalisant un tout homogène, ne serait que l'un des diamants de cette œuvre s'il ne s'agissait que de cela. Cependant, Josselin Billard, impliqué de manière très vive dans un processus créatif ultra sensoriel, fait preuve d'une prouesse narrative exceptionnelle. Non seulement il arrive à nous embarquer dans un univers de Fantasy cohérent, où la magie de la  mythologie inventée de toute pièce fonctionne à merveille, mais les mots qu'il utilise font mouche, dans un langage relativement châtié, bien qu'accessible, qui surprend par sa rareté dans le milieu bédéphile.


Car si la Fantasy, ou en tous cas l'Heroic Fantasy est certes à la mode depuis quelques décennies, l'auteur insuffle un vrai courant vital dans ses personnages, dans ses histoires, semblant tout droit venir de son âme et de son cœur. C'en est fascinant. Et il s'en explique avec sincérité dans une  postface bienvenue, tandis que son collègue Romain Mobias, scénariste de la série précédente : Grégory Sand, signe lui une préface élogieuse.  
Un jour, sûrement dans peu de temps, on considérera Les Contes du givre comme un livre essentiel de la culture Fantasy. Au même titre que d'autres albums ou publications d'auteurs devenus cultes, des années 60, 70, 80, 90, Josselin Billard a créé un univers, à la fois scénaristique et graphique dont la beauté intrinsèque est faite pour briller. Mais cette lumière venue des profondeurs des grottes d'Hinim, portée par les contes de Baba la vieille taupe, est entourée d'un puissant halo d'humanité fluorescente.
On en reste pantois.

FG

 Tous dessins © Josselin Billard - Komics Initiative


Les Contes du givre : Ode Materia par Josselin Billard
Éditions Komics initiative (17€) - ISBN :
978-2-491-37423-5

mercredi 22 septembre 2021

Quadrinhos : la nouvelle bande dessinée brésilienne

Il n'existait pas de bouquin français sur la bande dessinée brésilienne ? Pas de souci. Profitant d'une résidence à Angoulême en 2015 où se rencontrent des auteurs internationaux, Alain François et Elric Dufau échangent et concoctent cette anthologie bienvenue.

On aime les livres sur la bande dessinée, et s'il est vrai que les éditions Vertige Graphique avaient proposé en 2008 un album broché traitant de l'Argentine, (Historieta, Regards sur la bande dessinée argentine), rien n'avait vraiment fuité jusqu'à présent, ou si peu, sur un pays où la culture autochtone a subit depuis des siècles pas mal de brassages. Dans l'étude très didactique qui accompagne les 17 récits noir et blanc ou couleur d'auteurs issus pour la majorité de la dernière vague créative, Maria Clara Carneiro, chercheuse et professeure à l'université Fédérale de Santa Maria, mais aussi traductrice de certains de nos meilleurs auteurs hexagonaux modernes, rappelle que jusqu'au début du 21e siècle, il n'existait quasiment pas d'éditeur et ou de boutiques de bandes dessinées dans le pays. Cette culture se réduisant à certaines publications humoristique dans les journaux. De plus, la plupart des éditions du vingtième siècle ont été gérées au Portugal (cf les éditions Flamboyant et Record, qui ont édité par exemple As aventuras de TinTim, à partir de 1961). Quoi qu'il en soit, et  bien que l'avenir et le présent ne soient pas franchement radieux en termes de politique culturelle, on note depuis une dizaine d'années environ de belles créations et l'existence de fanzines et blogs de nouveaux auteurs. 

Sans doute Luli Penna est elle d'ailleurs responsable sans le savoir du miel de cette anthologie, avec son récit personnel Cocotiers et clichés, contant avec une rare poésie l'histoire culturelle du Brésil, à partir d'un tableau mettant en scène des danseurs sous des cocotiers, qui l'a suivi depuis son enfance. Car si tous les récits présents apportent une touche, sinon exotique, du moins originale, bien que l'on ait parfois l'impression d'avoir déjà perçu quelques vibrations esthétiques et ou narratives dans d'autres anthologies françaises mettant en relations d'autres auteurs internationaux, une majorité d'entre eux délivre un message, une impression, ou témoigne d'une manière de ressentir la vie dans ce pays traversé par de nombreux questionnements : politiques, écologique, sociétaux, culturels...


A cet égard, les pages d'Eduardo Belga et Mateus Acioli privilégient un langage très contemporain et ardu, en noir et blanc, pour délivrer un message presque codé (par crainte de représailles ?) utilisant des images abstraites et ou des techniques radicales, issues de l'esthétique punk, très "Amokienne" afin de dénoncer, assez clairement, les dérives d'une présidence quasi dictatoriale actuelle, du moins le traduit-on ainsi. Les autres auteurs : Stêvez, Pablo Carenza, Cynthia B, Aline Zoubi, Daniel Og, Diego Gerlach, DW Ribatski, qui a l'honneur de la couverture, Pedro d'Apremont, Rafael Corea, Vinicius Mitchell, Fabienne Langona, Gabriel Goes, Luiz Berger, ou bien Mariana Paraizo, nous offrent des œuvres davantage marquées par l'underground espagnol ou américain, que les amateurs de petits éditeurs, de comics ou de fanzine reconnaîtront. On notera d'ailleurs l'emprunt de la série The Archies chez Gabriel Goes, qui revisite avec talent et dans son Peps comics, l'Erotic trash des vieux fascicules vendus sous le manteau. Tous ont à cœur de dénoncer beaucoup de chose, et cette ébullition donne une idée du vivier brésilien, prêt à exploser.
Bravo aux éditions alternatives Onapratut pour nous donner l'occasion de découvrir autant de vitalité. Une anthologie gouteuse.

FG


Et pour aller toujours plus loin, une introduction à la BD brésilienne de Maria Clara Carneiro, préalablement publiée dans la Lettre du Bureau international du Livre, édition de mars 2015, « Dossier Brésil », qui insiste sur le renouveau actuel, avec de belles illustrations : http://marsam.graphics/quadrinhos-la-bd-made-in-bresil-figures-libres/

 

Quadrinhos la nouvelle bande dessinée argentine. Sous la direction d'Alain François et Elric Dufau-Harpignies.
Éditions Onapratut (15€) - ISBN : 9782953732887



dimanche 29 août 2021

Mambo de Claire Braud : court petit léopard, l'amour est derrière toi !

Une grande couverture toute jaune, d'un jaune d’œuf bien mûr, où court une belle femme déguisée en peau de léopard,
et un titre au graphisme art déco du plus bel effet. A l'intérieur, des dessins sans cases, sans limites, au trait fin, appelant la liberté à grand cri.
Faut-il raconter "Mambo" ? Non, je ne crois pas. Rentrez librement, et laissez-vous embarquer dans ce Road Movie à la française, bourré de poésie et de folie.

Il y a du Blutch dans ce que dessine Claire Braud, surtout dans les mouvements, tout en théâtralité et décomplexion, mais la comparaison s'arrête là, quoi que l'on trouvera aussi dans ce récit tout à fait rocambolesque et jubilatoire de la folie
de l'auteur de Sunymoon, Blotch, Total jaz, ou encore Peplum. Et pour en finir avec les comparaisons qui finissent toujours par ennuyer, ne faudra t-il pas évoquer à propos du trait fin de l'autrice, celui des exquises esquisses de Rupert et Mulo, ou bien d'un Joan Sfar inspiré ?
Cette appartenance à une "école" du trait libre étant posée, louons le travail de grande maitrise de Claire Braud, où la dextérité d'un dessin pouvant dire ce qu'il veut, se met au service d'une improvisation scénaristique la plus débridée. Comme si l'autrice avançait en posant sur le papier tout ce qui lui passe par la tête, sans aucune censure, sinon à garder un fil conducteur.
Il y a fort à parier que ce Mambo a été conçu dans cet état d'esprit : libre, sauvage, mais aussi amoureux. Très amoureux. Car il y a du sexe au sein de ces pages, mais pas celui que l'on pense. Il y a de l'amour surtout, mais pas celui que l'on imagine... Les corps se dévoilent, mais les esprits se cherchent, jusqu'à la fin, évoquant dans leurs hésitations de bien terre à terre raisons :  rdv chez le dentiste, organisation d'un opéra foutraque, sur le compte de la société où l'on embauche, ou velage en urgence à la ferme. Et puis, à la fin : un accident de trente-cinq tonnes transportant des cadeaux.
Une danse entre deux hommes conclue ce très agréable divertissement, que l'on verrait bien filmé par Fellini, et pourquoi pas mis en musique  par Serge Gainsbourg. Qu'est-ce que ça fait du bien.
 "Mambo miam miam !"

FG 

Mambo, de Claire Braud
Édition l'Association, collection Eperluette. 2011.

dimanche 18 juillet 2021

Locke and Key in Pale Battalions Go 3/3



Cette chronique fait suite à celle, précédente, ayant présentée les deux premiers épisodes. 

Conclusion brutale mais grandiose de ce spinof de la série culte de Joe Hill et Gabriel Rodriguez se déroulant au moment des évènements de la guerre d'Ypres, dans les Flandres. 
Blessé au combat, John Locke se réfugie grâce à l'une de ses clefs dans sa maison de KeyHouse mais est rattrapé par la brigade du lieutenant allemand Erich Murnau. Dans l'affolement, le plus jeune soldat blesse mortellement Fiona, la maîtresse de maison, tandis que John est placé dans la commode "réparatrice". Le reste de la famille lutte plus ou moins à armes égales avec les trois autres soldats, et alors que Murnau s'est coiffé de la couronne dirigeant l'armée des ombres...


Au final, les intrus seront chassés, et John sauvé, tandis que Fiona périra. Conscient de sa culpabilité, John ira la rejoindre en s'immergeant avec la clé de téléportation dans les bas fonds où repose le Titanic. La scène finale où son père reçoit dans la boîte aux lettres magique un courrier de lui venant de l'enfer est poignante à souhait et digne des meilleurs récits imaginables. Joe Hill arrive à nous emporter très loin avec cet épisode de la guerre de 14-18, dont les deux premiers numéros avaient installés un climat oppressant. Dans ce dénouement, rien n'est laissé au hasard, et les clefs, une fois encore, démontrent leur pouvoir destructeur.  Le romantisme affleure pourtant, dans les décors comme dans les textes lus, au milieu d'un drame intense. Du grand art et une mini série sublime. 
La suite, très vite ici, dans le crossover L&K Hell and Gone a Sandman Universe.

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