vendredi 28 décembre 2007

Alix : 60 ans déjà !

Il aura fallu un peu de temps pour rédiger cette chronique, mais la voilà enfin !
Il faut dire qu’avec cette nouvelle année 2008 qui s’annonce chargée en évènement autour du personnage d'Alix et de son créateur Jacques Martin (et des 60 ans du Lombard, premier éditeur de la série) il aurait été incongru de louper l’occcasion. 60 ans donc que le collaborateur de Hergé a créé ce jeune personnage gaulois, adopté par les romains et 60 ans que des milliers de lecteurs se délectent de ses aventures si exceptionnelles.

Une reprise difficile.

L’ibère, tome 26 de la série vient de paraître ce mois de novembre 2007 et après quelques dérives graphiques dues à un héritage lourd à digérer (voir les tomes parus après “Le Cheval de Troie”, dernier album entièrement dessiné par Jacques Martin), il semble qu’un nouveau dessinateur (Christophe Simon) ait enfin retrouvé l’esprit du maître. Cela n’a pas été simple et bien que les tomes implicitement sus-cités ont eu a subir quelques critiques acerbes, on peut reconnaître à au moins un ou deux de ces derniers, sinon de grands scénarios au moins quelque histoire mémorable.

Je pense par exemple à “O Alexandrie” , mettant en scène les relations difficiles entre la princesse Cléopatre et son jeune frère tyrannique et incapable Ptolémé, ainsi que celles plus “tendres” entre Alix et la princesse.
Aaaah la belle Cléopatre ! Cette bande dessinée a bien sûr parue avant la série tv Rome produite par Canal plus, mais avec du recul, on ne peut s’empécher de penser que les sources sont les mêmes et que les scénaristes n’ont pu résister aux charmes de la belle, tout comme Alix ou le légionnaire Titus Pullo. Ce qu’Alix a apparemment consommé un soir dans un bain, Pullo l’a reçu sous une tente. (...)
Cocasse !
Cette scène, parmi d’autres tirées des aventures d’Alix démontre d'ailleurs s’il fallait encore le prouver que ce dernier a bien des relations hétérosexuelle.

Une mise au point

En effet, suite aux questions que de nombreuses personnes ont soulevé quant aux relations entre Alix et son “compagnon” Enak, rappelons l’interview “définitive” que Jacques Martin a accordé au site “Alix l’intrépide” puis plus récemment au webzine “les Enfants d’Alix” où il défit quiconque de prouver des relations de cet ordre entre les deux jeunes garçons. Les moeurs de la Rome antique n’étaient de plus pas franchement les mêmes qu’aujourd’hui.
Bien sûr... Mais pour ma part, je pense que si Alix et Enak n’avaient pas été des personnages de BD inventés de toutes pièce à une époque (les années cinquante) où il était de bon ton de faire accompagner son héros; mais bien de vrais jeunes gens, leurs relations telles qu’elles sont décrites dans leurs albums avec les péripéties qu’on leur connaît et leur promiscuité forcée n’auraient pu que réveler ou dévoiler je pense une homosexualité latente. ... Et alors ? Cela ne dérange en rien la qualité des intrigues, des aventures et du dessin de cette superbe série. Ce procès d’intention est donc ridicule et n’apporte rien.

Des tomes en manque d’inspiration.

La chute d’Icare” par contre souffre évidement d’un scénario trop léger pour retenir l’attention, même si la présence d’Arbacès semblait être prévue pour faire rebondir ce volume. (Arbacès s’humiliant avec les ailes d’Icare devant les remparts . Quelle scène désastreuse ... un Rastapopoulos n’aurait pas fait mieux en essayant d’écraser une araignée avec sa botte). (...). Quant à la “feinte” de la pendaison au final, cette idée est tellement tirée par les cheveux qu’on se croirait dans un mauvais western. ...Dommage.

Cette baisse de scénario est apparemment aussi le cas du “Fleuve de Jade”, que je n’ai malheureusement pas encore eu l’occasion de lire à l’heure actuelle (il y a d’autres priorités parfois...). Addentum/rectification du 15 Janvier 2012 :
En fait, il s'agit moins sur cet épisode d'une baisse de scénario que d'une aventure quelque peu isolée, dans son envie de partir sur un aspect fantastique des plus étonnants. Assez en tous cas pour se demander si l'on est bien encore dans la série antique habituelle. La rencontre avec ces hommes crocodiles (!?) au  cœur d'un périple digne des "Mines du roi Salomon" (cf film), reste néanmoins un moment inoubliable et place vraiment à part cet épisode. Une sorte "d'ovni" donc, dont la lecture reste très plaisante.



Les Barbares quand à lui me semble un album beaucoup plus efficace et intéressant , à bien des égards. Tout d’abord le lieu de l’intrigue : la frontière rhénanique, qui n’a que peu été abordée dans les aventures d’Alix, alors que les amateurs de la rome antique et de la “Guerre des gaules” savent combien cette frontière a joué un rôle important à l’époque. Le scénario est aussi copieux et les conditions du périple sont contées avec beaucoup de rythme et de rebondissements.
L’anti-héros, le tribun Tillius Carbo est antipathique à souhait et les relations avec les barbares, que l’on voit à peine (mais qui décîment une grande partie de l’expédition romaine) peuvent rappeller dans une moindre mesure celles des indiens “fantômes” d’Amazonie avec les conquistadores du film “La colère de Dieu” de Werner Herzog.

La cassure involontaire mais bien marquée dans l’amitié entre Alix et son ami Galva à la fin de l’aventure rajoute aussi à l’intérêt de cet épisode, un des meilleurs assuré par le dessinateur Morales à mon goût .

Des relations douteuses avec Jules César.

Roma, roma”, bien que difficile à supporter au niveau dessin (désolé), marque un autre intérêt dans la suite des scénarios de la période “de transition”. En effet, la scène d’ouverture sanguinaire montrant le massacre d’une famille romaine évoque tout d’abord le début du roman “La dernière légion” de Valério Manfredi; référence littéraire romanesque sur l’antiquité (et depuis adaptée au cinéma, mais pas pour le mieux).
Le fait que ce soit Alix (où plutôt un imposteur) qui soit à l’origine de ce massacre rajoute au suspense de l’intrigue qui se développe de façon plutôt “classique” dans le bon sens du terme, mais où le voyage ne se trouve pas au centre de l’histoire. On s’interroge par contre dans ce volume sur l’insistance qu’à le scénariste à rappeler les relations d’amitié entre le héros et Jules César.
Cela peut énerver. Car après tout... l’implication politique d’Alix n’a jamais été clairement développée et le fait qu’il soit sans cesse sous couvert d’un général “montant” lui hôte un peu de son intégrité et de son esprit d’indépendance. (nous verrons plus loin que l’auteur semble en avoir tenu compte depuis). Un bon album néanmoins.


C’était à Khorsabad”, histoire plutôt bonne, revient sur les débuts d’Alix et présente une aventure où le fourbe Arbacès réapparaît pour cette fois des actions dignes de sa méchanceté. Il n’a d’ailleurs jamais été aussi proche d’Olrik (cf Blake et Mortimer) dans les attitudes qu’il développe dans cet album.
Alix est mis en danger, Arbacès humilé une nouvelle fois, mais d’une belle manière, et César, situé au centre du récit, même si on le voit peu, “distribue ses récompenses” en fin de tome. Alix se lamentant de ne pas rester plus longtemps à ses côtés. (le voit-il si paternel ?)

Lorsque l’on sait ce qui attend le général quelques mois plus tard et ce à quoi il va prendre part dans sa guerre des Gaules (à savoir la répression de la révolte des Gaulois, peuple d’origine d’Alix),on peut s’interroger sur l’attrait que ce personnage peut avoir sur notre héros. Mais il semble que ce profil complexe faisait partie intégrante du caractère du personnage historique., et Alix verra peut-être ses relations changer dans le futur..., comme celles d’avec Galva ?
Cela mettrait en tous cas un peu de piment, car le parti pris “positif” sur César au fil des volumes peut je le répète énerver un peu.
Notons que Christophe Simon ayant terminé le dessin de cet album, on a un avant-goût positif du tome à suivre.


addentum : Cette chronique a été écrite juste quelques jours avant la lecture du dernier tome “L’Ibère” et la relecture du livre de référence consacré à l’auteur “Avec Alix”, dans lequel ce dernier explique pourquoi les relations entre Alix et César ne pourraient pas être plus explicites d’un point de vue...simplement historique ! En effet on se serait demandé quel était ce personnage qui jouissait d’autant d’influence sur le général.(...)

L’Ibère apporte en tous cas les premiers élements de réponses à ces questionnements. Jacques Martin a t’il tenu compte de remarques de lecteurs ? ou a t-il réussi à faire évoluer sufisamment ses scénarios pour permettre une “séparation” bienvenue entre le héros de papier et le personnage historique ?

L’Ibère propose en effet enfin une vraie relation humaine et réaliste entre ces deux protagonistes; puisque Alix prend le risque de décevoir le futur Empereur, en lui tenant tête en prenant quelque peu parti pour un peuple opressé par Rome.
En cela Alix redevient donc un être humain complètement responsable de ses actes et surtout indépendant. Cela fait plaisir, même s’il prend tellement d’initiative qu”il passe du coup pour plus “Général” que le général.
Quant à l’histoire même de ce tome 26 elle nous décrit une occupation romaine en hispanie et une bataille tellement documentée et réaliste que l’aventure passe finalement au second plan. Où sont passées les intrigues complexes ?; les rebondissements nombreux et inattendus ? les poursuites ?

Cet “Ibère” est une sorte de huis clôt très bien construit et admirablement dessiné mais qui donne presque l’impression d’être un livre documentaire.
Ce dernier ne fait pourtant pas partie de la collection “Les Voyages d’Alix” ?

La multiplication des collections chez Casterman ne fait-elle pas tourner la tête à ses responsables et Jacques Martin ne se prendrait-il pas les pieds dans sa toge ?

En conclusion, L’ibère propose un Alix redresseur de torts..; et de la série.
Ce qui est plutôt de bon augure pour la suite.


A visiter absolument :
Le site non officiel Alix l'intrepide : pour tout savoir sur la série, avec tous les albums décortiqués, un forum, des news...et le superbe webzine Les enfants d'Alix qui y est téléchargeable sous format PDF dans la rubrique : "Actualités".)
Au sommaire du n° 9 juste sorti pour Noël : 14 pages d'actualités exclusives :
— Christophe Simon en état de grace, interview
— Le contexte de l'Ibère
— Roger Leloup, interview
— Quoi de neuf chez Casterman ?
— Blandine raconte : Périclès
Et plein d'autres articles...


Le site du Lombard (et de ses 60 ans)

Exposition 60 ans d'Alix
: du 21 Septembre 2007 au 29 Février 2008 à Bruxelles.

dimanche 16 décembre 2007

La traversée du temps : revenir pour comprendre.

Je n'ai pas eu le temps de voir Paprika, mais ce film d'animation de 2006 écrit par le même auteur que LA TRAVERSÉE DU TEMPS : Yasutaka Tsutsui semblait intéressant.

Aujourd'hui, environ une semaine après avoir visionné La traversée... je me force un peu à en rédiger une chronique, car cela n'est pas aisé.


Mamoru Hosoda
n'est pas un réalisateur très connu pour l'instant du grand public européen. Il est né en 1967 et a surtout travaillé sur les longs métrages Digimon adventure : bokura no war game !, ou One piece : Omatsuri danshaku to himitsu no shima. Pressenti pour animer Le Château ambulant , on sait que c'est finalement Miyasaki qui a gagné le morceau. Dommage.

Le premier animé de ce réalisateur à bénéficier d'une sortie assez large sur nos écrans français et à avoir obtenu plusieur prix (dont le prix spécial du jury à Annecy 2007 ) est donc une oeuvre à ne pas louper dans la carrière croissante de ce jeune réalisateur. Il n'en reste pas moins que ce film à la dynamique étrange n'est pas un anime classique pour grand public, comme on aurait pu le croire en l'assimilant aux dernières oeuvres des studios Ghibli. Ce qui n'est pas le cas içi précisons le, il est d'ailleurs déconseillé aux moins de dix ans.

Tout d'abord, le titre très science-fiction signifie beaucoup et n'est pas à prendre à la légère. (j'ai d'ailleurs du mal à le mémoriser, je ne sais pas pourquoi). Nous ne sommes pas dans du fantastique ou de l'héroic fantasy, ni de l'aventure, mais bien dans de la SF, dans ce qu'elle a de plus psychologique et de contemporain. Le futur est quasi immédiat içi, et c'est surtout l'étrangeté des situations qui dérange.

Les jeunes publics (moins de dix ans donc) auront du mal à tout comprendre.
L'action se déroule en effet en gande partie sur un campus de Lycée et les réflexions amoureuses ou sociales de nos trois protagonistes principaux : à savoir : Makoto Konno, qui découvre par hasard le pouvoir de se déplacer dans le temps, Kosuke Tsuda, son complice doué (à l'école et au base ball), et Chiaki Mamiya, plus cool et que l'on découvrira en définitive à l'origine de ce pouvoir, ne parlerons que très peu aux jeunes enfants.

Ensuite, Ce film laisse bizarrement peu d'images en tête. C'est le constat que l'on peut établir. Ce film demande à être revu. On est très proche du manga littéraire dans le propos, et la réalisation ou en tout cas le scénario n'utilise pas les canons habituels du film d'animation japonais dit "grand public". On se rapprocherait par exemple d'avantage de films coréens tels ceux de Hong Sang- Soo.

La traversée du temps reste donc une oeuvre tout à fait intéressante et agréable , mais demande je pense au moins deux visionnages pour l'appréhender complètement.

Je ne lui trouve pas d'équivalent, et ne serait-ce que pour cette raison... il est un film à voir.

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