lundi 7 novembre 2022

133 rue de l'arbre mort : le chainon manquant de Noah Van Sciver, enfin en Français !

Avec "Un arbre mort"(One Dirty Tree, titre original, et jeu de mot sur "One Thirty Three"), daté 2018, Noah Van Sciver aborde de front sa jeunesse et sa vie familiale au 133 rue de l’arbre mort, où il a aménagé en 1994 avec ses cinq frères et sœurs et ses parents à Merchantville, une petite commune du comité de Camden, dans le New Jersey. Le chainon manquant d’une bibliographie déjà conséquente.

C’est avec beaucoup de réalisme, d’empathie mais aussi d’humour, que l’auteur décrit sa vie dans une famille mormone, auprès de ses nombreux frères et sœurs, dans ce qu’il est convenu d’appeler un taudis. Trop nombreux, les uns sur les autres, mangeant peu, avec un père sensé être avocat mais passant son temps à dessiner ou écrire de la poésie, (la mère ne pouvait travailler selon les règles de la communauté), Noah survit en grandissant avec des petits boulots tout en présentant ses projets de comics aux éditeurs, en parallèle de son grand frère Ethan, lui aussi dessinateur. Jeune adulte, il entame une relation avec Gwen, avec qui il emménage dans un appartement, mais cela n’est pas aussi simple lorsque l’on se veut artiste…




Publié chez Uncivilized Books en 2018, ce récit était  resté inédit en France, malgré les efforts des éditions l’Employé du moi depuis 2015 (entre autre avec Fante Bukowski : 3 tomes jusqu’en 2019) et Revival (Johnny Appleseed en 2019). C’est donc un grand plaisir de découvrir cet album en français permettant enfin de lire en intégralité une partie importante de la bio de cet auteur américain de la scène alternative des années 2010, découvert aux Etats-Unis en 2012 avec The Melancholic Hypo, the young Lincoln chez Fantagraphics.  D’autant plus que l’on a déjà eu l’occasion de vivre des passages de l’adolescence de Noah Van Sciver avec Mon aventure torride et Pour l’amour de l’art (L’employé du moi, 2020 et 2021). Les éditions Revival se posent parmi les éditeurs refuges permettant à des comics anciens ou modernes d’être lus par le lectorat français, et ils ont à cette occasion, lancé en août la collection Flipside, avec rabats (jeu de mot), qui accueille déjà d’autres comics de ce genre. Si vous n’avez rien contre les dessins de type fanzine très « lâché » de la scène alternative et aimez les récits autobiographies sincères et où l’humour est distribué avec talent, n’hésitez pas, ce petit roman graphique de 56 pages saura vous réjouir. On regrettera juste peut être une couverture bien moins sympathique que l'originale, au moins dans sa couleur marron unique. 

FG                                                                                                                                                                                                                                                                                                     Ci-dessus : la page titre reprend la couverture américaine originale.


133 rue de l’arbre mort, par Noah Van Sciver
Éditions Revival (14€) - ISBN : ISBN : 979-10-96119-57-8
Paru en Août 2022

Relire l'interview de Noah Van Sciver lors d'Agoulême 2019 ici.

dimanche 6 novembre 2022

Zombie World : un vingt-cinquième anniversaire fêté dignement !

25ème anniversaire de la parution de cet album clé dans la carrière de l'auteur d'Hellboy et réédition aux petits oignons et en couleurs.

Une sarcophage Hyperboréen récemment acquis doit être la pièce maîtresse d'une aile dédiée du musée de Whistler, Massachusetts. Sauf que...la momie présente à l'intérieure est un sorcier puissant vieux de 42000 ans qui était jusque là prisonnier de son coffin. Son influence, seulement contrainte, va néanmoins lui permettre de se délivrer, et de mettre en place son projet ultime : trouver une reine et réveiller les morts...


Paru une première fois en 1997 chez Albin Michel dans un format souple et en Noir et blanc, ce récit écrit par Mike Mignola mais dessiné par son ami Pat Mc Eown est à resituer dans son contexte. En 1997, si le personnage culte de Hellboy est déjà connu des lecteurs français, c'est seulement avec quatre premiers albums publiés par Dark Horse France, où le démon cornu travaille encore en solo et s'adresse à un public encore bien spécialisé. L'univers très particulier de Mignola et ses références lovecraftiennes n'étaient de plus pas encore ce qu'ils sont devenus depuis, tout comme la mode des Zombies, devenue tellement évidente depuis la série Walking Dead débutée seulement en 2005. D'ailleurs ce récit mêlant les deux univers, plus celui de Robert Howard, avec la référence Hyperboréenne, amène une première tentative de travail en équipe que le scénariste développera seulement à partir de 2002 avec la série parallèle à Hellboy : BPRD. Ici, il ajoute un ton teinté d'humour, ne permettant qu'à moitié de prendre au sérieux son histoire et en tous cas son personnage de sorcier, mais aussi l'équipe le combattant lui et ses zombies, menée par le major Damson. L'auteur l'explique d'ailleurs sans détour dans la postface de l'album, arguant qu'il s'est davantage agit d'une boutade, d'un défi auprès de son éditeur, que d'un projet plus conséquent. Cette histoire, s'étalant au long de trois comics et 66 pages, est en effet assez simple en fin de compte, et nous laisse un peu sur notre faim. Il est par contre évident qu'il s'agit d'un tremplin
pour le Mignola Verse à venir. Concernant son collègue Pat Mc Eown, qui avait fait ses preuves de dessinateur et créateur à l'époque avec la série Grendel, il nous surprend avec un dessin souple et tout en rondeur, se référant beaucoup, d'après ses dires, à Yves Chaland,  Roy Crane ou Steve Guarnaccia.

Effectivement, celui-ci s'inscrit pleinement dans les canons américains de l'époque et de chez Dark Horse, où des auteurs influencés par l'Europe donnaient à voir autre chose du comics. On pense plutôt, et entre autre, à Dean Haspiel et Paul Chadwick. Le fait de bénéficier des couleurs très agréables de Pamela Rambo, apporte un plus indéniable sur cette édition cartonnée particulièrement soignée, au papier épais et aux bonus nombreux, dont un cahier graphique de Pat Mc Eown annoté mais aussi les dessins de couvertures noir et blanc et couleur de Mike Mignola et ses pages de garde magiques. Si vous aimez ces ambiances, ces auteurs, n'hésitez pas un instant, car au delà de son importance historique, ce récit est présenté dans une édition quasi bibliophile (et à prix sympa) imposant le respect et prouvant que la forme peut valoir parfois autant que le fond. Bravo.

FG

 

Zombie World : le maître des vers
Pat Mc Eown et Mike Mignola, Pamela Rambo
Éditions 404 comics (14 €) - ISBN : 979-10-32404-09-6

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